#Facemout

Le confinement, ma paranoïa et mon écran

Ce matin, comme tous les matins, j’ouvre ma fenêtre. Non pas celle sur le lever du soleil, c’est encore trop tôt ; mais celle sur le monde de Facebook. Et c’est une suite de consternations mais aussi de délires en tous genres sur le confinement.

Au début, ça me faisait rire. J’y goûtais volontiers. Puis, ça a commencé à me lasser. Ce qui m’interpelle, c’est aussi l’attitude de certaines personnes que j’ai au téléphone, histoire de maintenir de véritables contacts humains. Avec la voix, c’est déjà bien mieux. Bref, je me trouve en décalage par rapport à leur manière d’appréhender le confinement. Je peux comprendre l’anxiété qu’il peut susciter mais je n’arrive pas à être dans cette disposition. Je me sens sereine.

C’est vrai que dans la précarité, on est déjà confiné économiquement.

J’avais donc un peu d’entraînement. « La résilience » comme ils disent !

Puis, un délire de plus…

Le gouvernement dans le comble du ridicule. Comme le dit le commentaire : « Ils sont perdus ».

Résignée face à leur incompétence flagrante, je ris pour ne pas pleurer.

Pour les besoins du Vilain Petit Mouton, je vais voir le résultat de cette idée lumineuse : https://solidarite-numerique.fr/

Puis là, rien de drôle, rien de super lumineux non plus mais un site comme un autre et une plateforme téléphonique. A priori, ils recrutent ! Ha ben, non, ça m’a l’air d’être du bénévolat ! En même temps, je souhaite bien du courage aux bénévoles. J’ai fait ça pour l’ANPE, en son temps ; avec un détail qui change tout, c’était en contact physique et non téléphonique.

Mais une angoisse m’étreint ! Et je reviens sur ça !

Puis je repense à la réflexion de mon ami devant l’annonce du site de médiation numérique : « Ils sont perdus ». Je me dis que tout dépend de la destination, non ?

 » Il y a deux erreurs par rapport à la théorie du complot. La première c’est d’en voir partout et la deuxième c’est d’en voir nulle part !  »

Franck Lepage

Le Capitalisme doit survivre. Les masses devront s’adapter à rester confinées, vulnérables car isolées, assommées d’informations, … Et les masses s’adapteront.

Je comprends que je me suis adaptée… Aujourd’hui, je me sens confinée. Aujourd’hui, j’ai peur. Aujourd’hui, Facebook ne me fait plus rire. Aujourd’hui, le monde de manque !

Tiens, j’allais encore oublier !

Je suis abonnée au Blog de Yannis Youlountas qui donne des infos sur la Grèce, notre futur proche. Nous n’avons plus de ses nouvelles depuis plus d’un mois ? Les yeux rivés sur le monde avec Facebook, je n’avais même pas remarqué. Rien, effacé du monde. Mais en cherchant bien, j’ai trouvé ça.

Facebook a effacé ma mémoire. Pendant un mois, j’ai oublié celui qui envoyait un post, voire plus, par semaine. Il a disparu des radars sans que personne ne s’en émeuve. D’accord, ce n’était pas un proche. D’accord, il était loin. Mais quoi ! Dans ce village mondial, qui est proche, qui est lointain ? Qui remarquerait, à notre retour à l’air pur, à la liberté déjà bien entamée, l’absence de ceux que l’on côtoie habituellement ? Il faudra se compter !

Ce proche virtuel, je le voyais pourtant tous les jours dans ma boite mail. Les infos, les images d’ailleurs, les sarcasmes désespérés de notre impuissance à cette vie qui nous dépasse, tout cela efface le présent pour en faire un souvenir lointain. J’étais déjà confinée sans le savoir.

Le capitalisme ne s’adaptera pas. Il veut nous adapter à ce flux constant, cette impuissance à agir sur nos vies. Le virtuel est déjà dans nos têtes et tout glisse sur nous. Facebook, internet, ce virtuel dans son omniprésence, dans son omnipotence a déjà posé le drapeau dans nos cerveaux. Et Covid 19 n’est que la fin bien pratique qui justifie les moyens pour confiner nos corps dans du télétravail, de la télé-éducation, de la télé-médecine, du télé-divertissement, du télé-sexe, et du télé-service public pour continuer le business. Pas d’argent pour l’hôpital, mais la restriction des libertés et donc la limitation de nos besoins de santé dans un confinement maîtrisé et sécurisé. Et les plus récalcitrants auront ça : https://solidarite-numerique.fr/

Ou ne seront plus !

D’ailleurs, qui s’en souciera si Mark n’en parle pas ?

Je voulais faire un papier sur un édito appelant l’opposition et la contestation à plus d’humilité. C’est très en vogue en ce moment.

Comme si l’humilité allait nous servir ! Elle a d’ailleurs été plutôt contre productive jusqu’à présent, à trop laisser à d’autre la responsabilité de nos vies.

Non, c’est de lucidité qu’il nous faut maintenant.

A trop vouloir tout maîtriser, en vain, ailleurs, là-haut, là-bas, là-où on n’est pas et où on ne nous entend pas, dans un tourbillon d’informations, de pétitions, de dérisions, d’élections, et aussi de leçons, nous finissons par oublier l’essentiel, la vie que nous survolons sur nos canapés qui bientôt seront les seuls à se mouvoir.

Nous n’aurons jamais de prise sur cette inconsistance. Nous n’avons de prise que sur nous-même ici et maintenant. Et il est clair qu’ils se fichent complètement de notre devenir. L’économie et l’entreprise sont leurs priorités. Ils préparent leur avenir.

N’attendons rien d’eux à la sortie ! Prenons un train d’avance. Ne préparons pas, changeons ! Sortons nos esprits de nos confinements maintenant ! Revenons au présent, revenons à nous, à ce que nous voulons et surtout interrogeons-nous à savoir si ce que nous regardons ne sert pas à nous éloigner de ce que nous pouvons toucher, palper, changer. Pour ma part, j’en suis convaincue.

Et, je ne veux pas passer ma vie à la remplir d’images vides de moi, vides des mélodies des voix, vides des parfums de la vie, vides de la chaleur du toucher, aseptisée de toute consistance du présent. Je veux me soucier de ceux qui m’entourent. Je veux partager avec eux un café, pas un pouce en l’air. Je veux rire avec eux en vrai. Je veux être contaminée par le rire et non pas par des petits boutons jaunes, bientôt seule image qu’il nous restera de l’autre.

Ne nous enfermons pas dans Facebook, ou c’est lui qui nous enfermera. Il a déjà commencé.

Solidarité oblige avec ceux qui essaient encore de sauver nos vies mais aussi les meubles de grand-mère, restons chez nous. Mais pendant qu’ils risquent leur vie, faisons notre part, gardons le lien, retrouvons les voix, appelons-nous, hélons-nous par les fenêtres s’il le faut, gardons et cultivons ce qu’il nous reste d’humain, de vivant, de vérité en nous, pour mieux nous retrouver après.

Si l’union fait la force, l’isolement la vulnérabilité. Et isolés, nous le sommes déjà dans nos têtes à trop vouloir voyager à l’autre bout du monde en un clic.

Si nous ne préparons pas l’après, maintenant, eux sont déjà en train de le faire. Et d’ailleurs, le deuil de milliers de rien sera un argument de poids pour nous faire accepter leurs solutions.

Je veux pas paranoïer mais je n’ai plus envie de rire en ce moment.

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Auteur

levilainpetitmouton@greli.net